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16/10/1974

et le silence surprit

le poème en plein

sommeil

 

alors le poème se

défendit

se défendit de n’être

qu’un troupeau

plus ou moins ordonné

de mots

 

le silence continua

de surprendre et

d’assaillir le poème

de tous les côtés à

la fois.

 

Après une lutte qu’il

sentit désespérée,

le poème finit par

s’excuser et s’enfuit

sur la pointe des pieds

tout en sifflant d’un

air faussement dégagé.

 

----

Tous ces poèmes

en rêve griffonnés

mais que la vie

chiffonne…

23/12/74

 

D’où vient

que vous ne

supportez pas plus

mon regard

que mon verbe

 

D’où vient

  qu’à me voir

  à m’entendre

vos cœurs se mettent

  à tanguer

  à sombrer

vaisseaux sous un grand vent

 

D’où vient

qu’à mon sang

               répandu

s’arrête toute vie

 

D’où vient

qu’à Poésie

              rien ne veut

              rien ne veut

              survivre

 

Me direz-vous

D’où vient tout cela

16/10/74

 

Nous sommes

En landes

En fougères et

En pins

En étangs

En courants

Et rivières

Et la guerre

Qui vient

Et la paix

Qui s’en va

 

N’y allons pas

N’y allons pas

 

La guerre qui

Vient

Comme un

Stupide accident

Un énorme

Accrochage

Un énorme

Accrochage

 

Les pins aussi

Sont des

Milliards

Et ils vivent

En paix

 

Nous sommes

En landes

En fougères

Et pins

 

Qu’irions

Nous faire

En armes

En colères

Et haine

 

Allez-vous fondre

Encor les cloches

De Notre Dame

En canon

 

Et les étoiles

En larmes

21/12/74

 

il fait une nuit

de femme au ventre

éclaté

tous organes dehors

il fait une nuit

de naissance étouffante

il fait une ombre

             de retour

il fait noir

             fait noir

                          noir

             no

             ir

sur les olives du jardin.

 

quand le poète

rejoint l’être…

18/01/75

Chantier de

démolution-

constriction

 

Grues en pleine

fornication

07/01/1975 

 

Enfants

Aux livrets scolaires

Préférez

L’ivresse colère

Aux diplômes passés

Haut-la-main

Préférez

Dix paumes tendues

Vers demain

A vie d’ange

En l’Esprit

Préférez

La vidange

Des esprits

18/01/75

Je feuillette mon

carnet flottant

et j’ai les doigts

plus allongés

que le sel

18/01/75

J’ai plus d’une clef dans mon tour

Ce n’est pas le grand ressac qui vous dira le contraire.

Il n’y a plus ni sac ni ressac.

Le ressac est mort.

Il ne vous a jamais

rien dit d’ailleurs

Allait

venait

allait

venait

muet

mais vous

23/01/75 

 

Chantier

Chantier interdit

Défense d’entrer

Danger de mort, illustration à l’appui

C’est écrit sur les hauts panneaux de bois qui délimitent ledit chantier

On ne voit rien que des grues, bêtes géantes sur lesquelles, écrit en gros caractères de fer, le nom de l ‘entreprise : D.C.

Je comprends où est le danger de mort.

D.C…

Démolution-Constriction sans doute !

Je longe la palissade.

A défaut de voir, on entend.

Bruit d’enfer (quoique je ne connaisse pas l’enfer)

Une affiche vient aussi me corriger : elle annonce que c’est un véritable paradis que l’on construit là. Haut standing, jardins, etc…

Je n’ai plus qu’à me rhabiller avec mon enfer, mon bruit d’enfer. Je dois avoir l’esprit mal orienté pour imaginer que ceux qui travaillent dans cet enfer et ceux qui « vivront » dans ce paradis ne sont pas les mêmes personnes !

Allons donc ! On n’a que ce qu’on mérite, n’est-ce pas ?

Passons ! Le long de la palissade. Il vaut mieux qu’elle soit haute. L’entreprise D.C. a tout prévu. Pas d’indiscrétion. L’exploitation est une chose, la liberté du travail en est une autre. Aucun rapport ! Et puis je ne suis qu’un passant, le passant est un acheteur en puissance, il n’a droit qu’à la révélation du « paradis », il a droit à sa petite part de paradis, que peut-il demander de plus !

Mais il est vrai que je suis un passant curieux, un horrible passant curieux sur cette avenue de 1965 Paris novembre.

Rentrant chez moi je sens des mains des doigts aigus qui pressent ma tête et s’enfoncent dans

Le bruit du chantier ne me quitte pas.

Les cris des hommes étaient mêlés aux grincements, aux coups brutaux des machines, presque naturellement, comme si l’on avait fabriqué grues, pelleteuses, foreuses et hommes dans la même usine, fondues à la même chaleur, coulés dans le même genre de moule. Ca cogne et ça hurle dans tout mon corps, ça chie, ça sue, ça meurt un peu.

Démolution.

Constriction.

Pars à …

dis ?

Le « paradis », ça se mérite…

8/02/75

 

Tellement partout

                Ailleurs

Qu’en moi-même

 

Tant de monts dans

Le creux de ma peine

Et tant de plaines

Au plus haut de

Mon mal

Je ne sais plus

                Où est la mer

Et où le feu

Tellement partout

                Ailleurs

Qu’en moi-même

 

Il y a trop de carnage

               En ce silence

Et dans mon sang

Trop de sens absent

 

Je ne sais plus

                                Où est le feu

                                Et où la plaie

Si elle était

                ailleurs

mais elle est en moi

                               partout

 

et je ne sais rien

Extrait de « Chanson des heures » 1975 1ére partie : 23 Heures

 

            « L’ISSUE »

            Il manque une heure

            C’est la faute à l’auteur

            Qui laisse libre

                          Le lecteur

De s’échapper

Du Temps

 

            Par cette issue

                                    Cette maille

                        La vingt-quatrième du filet

                        Qui s’abat

            Et se ferme chaque jour

      Sur nos rêves désarmés

09/1976

Si la vie a un sens tout est résolu

il faut que tout soit résolu

il faut que la vie ait un sens (NON ! le sens, on s’en fout. Il faut vivre)

Pour que la vie ait un sens il faut que la mort soit la clef de ce sens

il faut que la mort soit un orgasme

Pour que la mort soit un orgasme il faut se retenir de mourir le plus longtemps possible.

Vivre : se retenir de mourir.

Ne jamais pousser les caresses de la vie jusqu’à l’orgasme. Attendre. Les faire durer. Les varier. En inventer. Toutes les retenir.

 

                                             T

                                   MOR GASME

                                 MORTGASME

Cahier X  11/1979

La poésie

La poésie est

La poésie est éternelle

Seule la poésie est éternelle

Seule la poésie est éternellement seule

La poésie est seulement éternelle

L’éternelle poésie est seule

La poésie est seule

La poésie est

La poésie

1977

Ce qui se passe

se passe de moi

car passer me fut interdit au

jour du grand passage dans

ce qui se passe

Aussi n’ai-je ni passé ni futur

Je suis le grand passant

Passif

Et mon pas nul ne le suit

car il ignore toute passe

et tout dépassement

Mon pas s’appelle

effacement.

22/02/1981

 

les pommiers de sarah

du bout de leurs branches

font des chatouilles

au ciel, et les nuages

se mettent à pleuvoir de rire

il pomme rouge

au ciel d’égypte

il pomme verte

il pomme bleue

dessus le nil

les oiseaux de sarah

de la couleur des fleurs

à coups de bec éveillant

le soleil

le battement de leurs ailes

fait fuir la fumée

qui sort de la maison

de sarah

19/09/1980

Sur petit carré de feuille quadrillée scotchée :

L’absent, c’est moi

Absent, levez le doigt

Je suis l’absent de vos caresses

et le présent de vos soupirs

Je suis l’absent et le premier

qu’en votre songe vous craignez

En vérité, en vérité, je vous le dis,

l’absent, c’est moi.

25 /10/80

Qu’est-ce qu’un être quand il meurt

une page de livre qui s’envole

ou la feuille que l’automne met au sol

 

d’autres livres viendront

d’autres bourgeons

Qu’est-ce qu’un être quand il meurt

Ce n’est rien qu’une enveloppe qui se déchire et qui libère

(la vie ?)

03/1982

 

T’as plus qu’un ciel,

Paris, dans tes tiroirs.

C’est un mouchoir,

il est tout gris

d’avoir pleuré

18/04/81

Là où est le sable pyramide

le ciel se fait des bleus

si bleus qu’on dirait l’océan

ou les yeux d’un géant

le vent sans peur

s’en prend aux immenses sabliers

qu’il dévore en chantant

sans jamais les user

12/04/1983

 

   « Trac  »      / Traquer/      Tracas/

Craquer        Fracas                Crac

et cric           et tric et frac

tricherie      truc    et          troc

caca     troquer                   truquer

fric      et     trique froc

            patatrac

  « On tourne autour du pot »

© 2019 Stérin. Tous droits réservés. Photographies et retranscriptions : Marie-Christine Clément-Stérin

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